(AGI) - En Libye, l’un des pays les plus arides au monde, le changement climatique aggrave les pénuries d’eau, avec un impact fortement négatif sur la production agricole et sur les populations, contraintes de migrer. A Tripoli la crise de l’eau représente donc un défi de taille pour le gouvernement, de surcroît dans un contexte politique et sécuritaire instable.
Le Programme des Nations Unies pour le développement (Pnud) a tiré la sonnette d’alarme : la pénurie chronique d'eau dans ce pays du Maghreb est "l'une des plus grandes menaces" auxquelles il est confronté. Un diagnostic préoccupant d’autant plus que la demande en eau est déjà largement supérieure par rapport à l’offre.
Le scénario risque de se détériorer ultérieurement et rapidement au vu des températures record et des périodes prolongées de sécheresse qui portent à l’épuisement des maigres ressources hydriques, dans un territoire désertique à 95%. Pour toutes ces raisons, l’organisme ONU a souligné que Tripoli devra prendre des mesures proactives contre la sécheresse et la désertification croissante.
لجنة متابعة أزمة المياه الجوفية في زليتن تصدر التقرير الفني بعد الزيارات الميدانية للمناطق المتضررة. #ليبيا #المرصد https://t.co/v04TNsMqVn
— صحيفة المرصد الليبية (@ObservatoryLY) June 27, 2024
A ce titre, la situation de la région montagneuse de Jabel Nafusa est devenue emblématique du péril sécheresse et changement climatique extrême, qui a été documenté dans un reportage de l’Agence France Presse. La région montagneuse, que les Amazighs appellent Jebel Nafusa, est un plateau calcaire en Tripolitaine, au nord-ouest de la Libye, mais surtout c'est l’une des régions les plus durement touchées par la forte baisse de la pluviométrie et par des phénomènes météorologiques dévastateurs. Il y a encore quelques années, il s’agissait d’une zone privilégiée pour l’élevage de bétail, mais, ici aussi, la sécheresse chronique a fait de tels ravages que de nombreux agriculteurs ont été contraints de vendre leur bétail ou de le déplacer vers les villes proches de la côte pour y poursuivre l'élevage.
Le chef de la municipalité de Kabaw, Murad Makhlouf, a expliqué qu’au cours de la dernière décennie, pour survivre des centaines de familles ont dû migrer vers la capitale Tripoli et les villes côtières.
En réponse à cette urgence, le ministère libyen des Ressources en eau prépare la révision de la stratégie nationale de l’eau, qui devrait entrer en vigueur en 2025. Le "Projet de renforcement du cadre réglementaire, législatif et stratégique de l'eau sera" mis en œuvre grâce à un financement de la Banque africaine de développement (FAD) et du Fonds africain de développement (FAD), en tant qu’administrateur du Fonds fiduciaire MIC-TAF. "Ce projet vise à évaluer et à améliorer le cadre réglementaire, juridique, institutionnel et stratégique du secteur de l’eau qui renforcera le contrôle et la gestion durable des ressources en eau qui diminuent, en particulier les ressources en eaux souterraines", indique la BAD.
Le pays d’Afrique du Nord dépend encore d'un projet de rivière artificielle lancé par l'ancien président Mouammar Kadhafi dans les années 1980, les eaux souterraines étant acheminées depuis l'extrême sud du pays. Lorsqu'il a été inauguré dans les années 1990, avec le premier gazoduc reliant Murzuk (ou Mourzouq) à Tripoli en 1996, Kadhafi l'a qualifié de huitième merveille du monde. Sa "grande rivière souterraine" fournit toujours plus de 60 % de l'eau libyenne, en particulier dans les villes côtières. Cette dernière est toutefois puisée dans des aquifères "non renouvelables", qui ne peuvent être régénérés par la pluie. Pour la Libye, la vraie richesse de l'avenir sera donc "l'or bleu" au lieu de l'or noir.